NS Avocats Les différences de destinataires du congé d’un bail commercial et de la demande de renouvellement

En fin de bail ou de période triennale, un congé doit être délivré par le bailleur selon les formes des articles L145-4 et L145-9. L’article L145-10 du code de commerce permet l’envoi de la demande à la personne du bailleur ou à son gérant. Toutefois, en matière de congé, régi par l’article L145-9 du code de commerce, une telle possibilité n’est pas prévue. La cour d’appel de Paris est venue le rappeler. Un arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence de 2017 statuera plus tard dans le même sens.

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Cour d’Appel de Paris, Chambre 5, 2 Décembre 2015, N° 13-20.706

Un bail commercial a été conclu à usage de bureaux.

Par avenant à ce bail, le bailleur a accordé au preneur la possibilité de donner congé des locaux loués pour une date donnée, dans les formes et conditions prévues dans le bail initial, soit en le prévenant au moins 6 mois à l’avance par acte extrajudiciaire.

Le locataire fait délivrer un congé au bailleur. Par lettre en réponse, la SCI bailleresse a contesté la validité de ce congé, faute d’avoir été délivré à son siège social, et a informé la société locataire que le bail se poursuivait jusqu’à la fin de l’échéance triennale en cours.

La société locataire a réglé les sommes de loyers et charges dues jusqu’à la date d’effet du congé qu’elle avait donné mais non jusqu’à l’expiration de la période triennale puis a quitté les lieux.

Elle a donc été mise en demeure de payer le solde restant dû. La société locataire a appelé en garantie l’étude d’huissier et, en cours de procédure, a fait délivrer un nouveau congé. que c’est dans ces circonstances que le tribunal a statué par le jugement déféré.

Le tribunal de grande instance a rejeté la demande du locataire, estimant le congé nul du fait du mauvais destinataire, comme le demandait le bailleur.

La société locataire interjette appel et se fait de nouveau débouter.

La cour d’appel juge qu’il résulte de l’acte d’huissier de justice que le congé a été délivré à la SCI bailleresse ayant son siège dans une ville donnée, représentée par son gérant une société commerciale, elle-même représentée par une autre société, elle-même représentée par une personne physique ayant son domicile à Paris.

Ce dernier étant absent, copie de l’acte a été déposée en l’étude de l’huissier de justice.

L’étude d’huissier intervenant à l’acte défend la validité de son congé en estimant que :

1/ l’application de l’article L145-9 du code de commerce n’exclut pas l’application des règles d’ordre public relatives à la signification des actes d’huissier de justice, notamment l’article 654 du code de procédure civile qui dispose que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir ou à toute personne habilitée.

2/ elle n’a pas fait signifier l’acte au siège social de la SCI, mais à l’adresse du représentant légal de celle-ci, étant précisé d’une part que la société commerciale est gérante associée de la SCI et qu’elle a pour président cette autre société représentée par son gérant personne physique ; d’autre part, soutient-elle, l’un des associés de cette dernière est une société, anciennement dirigée par la personne physique, ayant un établissement principal la même adresse que la SCI bailleresse.

3/ que le congé a été délivré dans les formes d’une signification à domicile à cette dernière adresse, selon les prescriptions des articles 655 et 656 du code de procédure civile, le domicile ayant été certifié par la personne présente qui a refusé de recevoir l’acte.

Elle estimait subsidiairement que la nullité n’était qu’une nullité de forme, et non de fond, ce qui supposait qu’il fallait prouver l’existence d’un grief.

Pour autant, la cour d’appel n’épouse pas cette argumentation.

Elle considère que si l’article L145-10 du code de commerce prévoit que le locataire qui veut obtenir le renouvellement de son bail peut signifier sa demande au bailleur ou bien au gérant de celui-ci qui est réputé avoir qualité pour la recevoir, cette disposition n’est pas prévue par les articles L 145-4 et L 145-9 du code de commerce pour le congé donné par le locataire.

En conséquence, le congé devait être délivré à la SCI Cerda, elle-même, à son siège social.

La signification du congé faite à une personne autre que le bailleur équivaut à une absence de congé.

Dès lors c’est en vain que l’étude d’huissier allègue d’une nullité de forme, d’une absence de grief et de préjudice.

Il s’agit d’une nullité de fond.

Le bail s’est donc bien poursuivi pour une durée allant jusqu’à l’expiration de la période triennale en cours, qui a pris fin par la délivrance du congé valablement délivré en cours de procédure.

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