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De par sa nature, la cession d’un fonds de commerce, élément essentiel de la vie d’un commerçant, revêt une importance majeure. Elle fait intervenir deux parties à sa conclusion, le cédant et le cessionnaire (ou acquéreur), et se découpe en plusieurs étapes. Afin d’en assurer le bon déroulement, mais également pour préserver les droits de chacune des parties, ainsi que des tiers au contrat, plusieurs conditions doivent être observées.
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La validité de toute cession de fonds de commerce repose sur des exigences de fond, relatives, d’une part, à la capacité et au consentement des parties (A) ; elle repose, d’autre part, sur l’objet de la cession (le fonds proprement dit), lequel doit comprendre les éléments essentiels du fonds de commerce (B).
Tant l’acquisition que la cession d’un fonds de commerce supposent la capacité et le pouvoir d’y procéder.
Dans le cas d’une personne physique protégée, il conviendra d’obtenir l’autorisation du conseil de famille ou du juge des tutelles que la vente d’un immeuble (articles 389-5, 457 et 495 du Code civil).
De même, en ce qui concerne les rapports entre époux, ces derniers ne peuvent, l’un sans l’autre, céder le fonds de commerce dépendant de la communauté. Ils ne peuvent, sans leur conjoint, percevoir les capitaux provenant de telles opérations (article 1424 du Code civil).
Par ailleurs, l’exploitation d’un tel fonds ayant pour conséquence de rendre l’acquéreur commerçant, ce dernier devra avoir la capacité d’exercer une profession commerciale.
Enfin, comme dans tout contrat, le consentement des parties doit être acquis sur la base de la chose et du prix ; ce consentement devant être exempt de tout vice (v. infra pour les conséquences).
À titre liminaire, il est rappelé que la clientèle est l’élément essentiel du fonds de commerce, sans laquelle la qualification de fonds de commerce ne peut être retenue. À défaut de clientèle, la « cession de fonds de commerce » risque d’être requalifiée en cession de « droit au bail ».
Il est capital de lister au sein de l’acte de cession les éléments incorporés au fonds. Un manque de précision laissera aux juges la possibilité d’apprécier et donc de modifier la liste de ces éléments. La Cour de cassation considère que l’ensemble des éléments indispensables à l’existence d’une clientèle font partie intégrante de la cession ; en cela, sont notamment compris la licence d’exploitation d’un débit de boisson, le nom commercial, l’enseigne, le droit au bail.
Quand bien même le contrat de cession ne le prévoirait pas, nombre d’éléments sont transmis à l’acquéreur :
Tous les éléments du fonds de commerce ne sont pas à inclure. Étant entendu que les parties peuvent conventionnellement les y inclure. Parmi les éléments généralement exclus, sauf convention contraire donc, on retrouve :
Bien souvent, les parties entendent faire précéder l’acte de cession d’une promesse de cession.
On parle de promesse synallagmatique de vente (ou compromis de vente), lorsque les deux parties s’engagent, l’une à céder le bien, l’autre à l’acquérir. Celle-ci devra, pour valoir vente, contenir les énonciations requises pour la vente proprement dite. Les deux parties devront donc s’être entendues notamment sur l’objet (le fonds et ce qu’il contient) ainsi que sur le prix.
Certaines promesses synallagmatiques de vente sont accompagnées d’une clause de dédit, prévoyant le versement d’une indemnité de 10% du prix de vente par la partie défaillante à l’autre partie.
Enfin, il est important de conditionner la réalisation de la vente à la réalisation de conditions suspensives, notamment l’obtention d’un prêt (condition suspensive).
Les articles L214-1, L214-1-1 et R214-1 et suivants du code de l’urbanisme prévoient un droit de préemption qui peut être exercé par les communes (ou leurs délégataires s’il y a lieu) dès lors qu’il y a aliénation à titre onéreux d’un fonds de commerce ou d’un fonds artisanal situé dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, délimité par délibération motivée du conseil municipal.
Aussi, toute personne entendant vendre son fonds de commerce doit, à peine de nullité, en effectuer la déclaration préalable à la commune. Cette déclaration mentionne un certain nombre d’éléments parmi lesquels : le prix, l’activité du cessionnaire, le nombre de salariés, la nature de leurs contrats de travail, les conditions de la cession, les chiffres d’affaires réalisés au cours des trois dernières années.
La commune dispose d’un délai de deux mois à compter de la réception de cette déclaration d’intention d’aliéner pour exercer son droit de préemption. Un silence de sa part après expiration du délai de deux mois vaut renonciation à l’exercice de son droit de préférence et le cédant sera libre de céder le fonds aux conditions figurant dans sa déclaration.
Parallèlement à cette demande, la personne en charge d’opérer cette déclaration s’assurera de demander un certificat d’urbanisme permettant d’indiquer au cessionnaire es règles d’urbanisme applicables à un terrain donné (règles d’un plan local d’urbanisme, par exemple), les limitations administratives au droit de propriété (par exemple, servitudes d’utilité publique, droit de préemption, zone de protection dans le périmètre d’un monument historique), la liste des taxes et participations d’urbanisme (par exemple, taxe d’aménagement, participation au financement d’équipements publics).
Le gérant de la société cédante doit informer ses salariés de son intention de vendre dans les conditions fixées par le code de commerce. Les dispositions applicables sont visées par les articles L141-23 à L141-27 du code de commerce pour les entreprises de moins de cinquante salariés ; les articles L141-28 à L141-32 concernent les entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés.
L’article D141-4 du code de commerce prévoit que l’information peut être effectuée au cours d’une réunion d’information des salariés à l’issue de laquelle ils signent le registre de présence, par affichage (une attestation de prise de connaissance est requise), par courrier électronique (à la condition que la date de réception puisse être certifiée), par remise en main propre (contre émargement), par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, par acte extrajudiciaire et par tout autre moyen de nature à rendre certaine la date de réception.
L’une des spécificités de la cession de fonds de commerce est qu’elle est soumise à une exigence légale de publicité en vue d’assurer la protection des créanciers du cédant. Néanmoins, comme c’est le cas pour toute vente, la cession de fonds de commerce peut parfaitement être conclue sans aucun écrit. En pratique, les cessions font quasi-systématiquement l’objet d’un écrit. La vente orale ne présentant aucun avantage particulier, et restent soumises à l’enregistrement ; l’absence de toute trace tangible constituant, par ailleurs, un problème en matière probatoire.
Avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019
La loi impose au cédant d’énoncer dans l’acte de vente certaines mentions limitativement énumérées à l’article L. 141-1 du Code de commerce.
Ces mentions sont d’ordre public et permettent de prémunir l’acquéreur contre les fraudes. Il s’agit notamment des mentions relatives : à l’origine de propriété, à l’état des inscriptions grevant le fonds (privilèges ou nantissements), au chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation des trois derniers exercices comptables nombre réduit à la durée de la possession du fonds si elle est inférieure à trois ans), aux conditions du bail (souvent annexées ou reproduites au sein de l’acte de cession). L’omission des énonciations ci-dessus, précise l’article L. 141-1 du Code de commerce, peut entraîner, sur la demande de l’acquéreur du fonds (et seulement lui), formée dans l’année, la nullité de l’acte de cession.
Après l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019
Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019, les modalités de cession de fonds de commerce ont été assouplies.
Cette loi abroge en effet purement et simplement l’article L141-1 du code de commerce. Ces indications avaient vocation à protéger les acheteurs de fonds de commerce des manœuvres des vendeurs visant à augmenter frauduleusement le prix du fonds. Le législateur estimant ce formalisme excessif et à l’origine d’un contentieux inutile en a simplifié les formalités relatives à la cession.
L’acte de vente du fonds de commerce doit être enregistré. L’enregistrement est obligatoire même pour les ventes conclues par acte authentique (article 635, 1-1° du code général des impôts).
L’enregistrement doit en principe intervenir dans le mois de la vente et la déclaration dans le mois de l’entrée en possession du fonds (articles 635 et 638 du code général des impôts).
Toutefois, si la cession n’a pas été passée par acte authentique, ce délai est réduit à moins de quinze jours.
Cette formalité est fondamentale en ce qu’elle conditionne la validité du privilège du vendeur, ainsi que la publicité de la vente conclue par acte sous signature privée ou sans acte.
L’article L. 141-12 du Code de commerce dispose que la vente est « publiée à la diligence de l’acquéreur sous forme d’extrait ou d’avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ». Cette publication doit intervenir dans les 15 jours suivant sa date de conclusion.
Il est à noter que la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 dite dite « loi Macron » avait supprimé l’exigence de publicité dans un journal d’annonces légales.
Cette suppression a été de courte durée. En effet, l’article 21 de la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 dite « loi Sapin II » est revenue sur cette abrogation en restaurant l’obligation de publier la vente dans un journal d’annonces légales.
L’article L141-12 du code de commerce a été rédigé comme suit :
« Sous réserve des dispositions relatives à l’apport en société des fonds de commerce prévues aux articles L. 141-21 et L. 141-22, toute vente ou cession de fonds de commerce, consentie même sous condition ou sous la forme d’un autre contrat, ainsi que toute attribution de fonds de commerce par partage ou licitation, est, sauf si elle intervient en application de l’article L. 642-5, dans la quinzaine de sa date, publiée à la diligence de l’acquéreur sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département dans lequel le fonds est exploité et sous forme d’extrait ou d’avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. En ce qui concerne les fonds forains, le lieu d’exploitation est celui où le vendeur est inscrit au registre du commerce et des sociétés. »
La publication doit comporter les éléments suivants :
Tel que cela a été évoqué plus en amont, à la date où la cession a été conclue, cette publication ouvre le droit aux créanciers du vendeur de faire opposition au règlement de la cession.
En effet, ce n’est qu’à défaut d’opposition des créanciers que l’acquéreur pourra payer le prix de la cession au vendeur. La publication ouvre un délai de 10 jours aux créanciers pour s’opposer au paiement du prix. L’acquéreur qui paierait le vendeur sans avoir publié la vente ou sans avoir attendu l’expiration du délai de 10 jours n’est pas libéré à leur égard (article L. 141-17), peu important, que lesdits créanciers aient ou non fait opposition au paiement du prix (Cass. com. 24 mai 2005). En cas d’opposition, le vendeur dispose d’un recours. A défaut d’opposition, l’acquéreur pourra régler directement le prix au vendeur.
Dans le cas d’une première activité commerciale, l’acquéreur, s’il n’a jamais été commerçant, doit demander son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; ou bien, s’il l’est déjà, demander une immatriculation secondaire, complémentaire ou modificative. Il peut s’agir, dans le cas du vendeur qui souhaiterait de cesser son activité, de requérir sa radiation au registre du commerce et des sociétés compétent.
Si le fonds de commerce vendu comprend des brevets, des marques, des dessins et des modèles, les formalités de publicité subséquentes et propres au transfert de ces biens devront être accomplies.
Lors de la prise de possession des locaux par le locataire, le transfert du droit au bail inclus dans le fonds devra faire l’objet d’un état des lieux (article L145-40-1 du code de commerce).
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